Fonte:
www.lefigaro.fr
Autore:
Valérie Segond
Les Juifs d’Italie se rallient à Giorgia Meloni
Le soutien sans ambages de la chef du gouvernement à Israël impressionne la communauté juive du pays.
EUROPE A’ l’été 2022, les juifs de Rome sont terrifiés à l’idee de voir une héritière du Mouvement social italien au pouvoir. Edith Bruck, 92 ans, survivante d’Auschwitz, qualifiait alors Giorgia Meloni de «monstre». Si elle la rencontrait, lui serrerait-elle la main? «Dans une situation aussi difficile, j’essaierais de l’éviter», répondait-elle. Aujourd’hui, la nonagénaire confesse au journal Corriere della Sera : «l’ai changé. Ces images de têtes d’enfants décapités utilisées comme ballon de football sont les mêmes que celles d’Auschwitz. Parmi les migrants qui arrivent, il peuty avoir des terroristes. Nous devons remercier Giorgia Melonl et Matteo Salvini, pour la façon dont ils défendent Israël» De fait, « Giorgia Meloni a comme tous les pays européens immédiatement pris la défense d’israel et condamné de façon nette et absolue tes atraques du Hamas, explique Noemi Di Segni, présidente depuis 2016 de I’UCEI, l’Union des communautés hébraïques italiennes. Mais ceci sans réserve aucune, ni arrière-pensée, quand la gauche défend Israel avec un “mais”… », précise la représentante, pourtant partisane de la gauche. Pour gagner des voix? Sachant qu’il n’y a que 25 000 juifs en Italie, soit vingt fois moites qu’en France, l’enjeu est ailleurs. Certes, rappelle Riccardo Pacifici, ancien président de la communauté juive de Rome, «Giorgia Meloni s’inscrit dans le sillage de son mentor en politique, Gianfranco Fini, l’ex-leader du MSI qui en novembre 2003 fit un voyage historique à Yad Vashem, où il reconnut ta responsabilité du fascisme dans l’adoption des infàmes lois raciales de 1938». Ce fut le tournant des relations entre l’Italie et Israel. «Mais elle est allée plus loin, estime Walker Meghnagi, président de la communauté hébraique de Milan. Après Berlusconi en 2011, les gouvernements de gauche ont toujours été propalestiniens et votaient systématiquement les résolutions de l’ONU contre Israel. Or, depuis l’arrivée de Giorgia Meloni, l’Italie s’abstient. » Si elle s’est toujours montrée très proche d’une communauté dont elle ne manque aucune commémoration, c’est encore plus vrai où’ depuis le 7 octobre, :out le gouvernement est mobilisé pour prévenir les attaques antisémites. Et ce, alors que, «jusque-là, l’antisémitisme en Italie était plutôt fuit de préjugés que d’actes contre les juifs, à l’inverse de lu situation en France », explique Betti Guetta, responsable de l’Observatoire de l’antisémitisme. Mais les massacres du 7 octobre, selon elle, indiquent qu’il n’est plus seulement question de préjugés, mais d’une volonté de destruction physique des juifs. Giorgia Meloni le saisit tout de suite. Le 10 au matin, elle vient dire son effroi au sein du ghetto de Rome devant «cette chasse aux civils maison après maison pour traquer les enfants. Derrière, fly aplus que la bitte contre Israël, il y a la haine contre rout un peuple». Ses mots vont droit au coeur des juifs de Rome qui apprécient la disponibilité totale du gouvernement à son égard alors que les actes antisémites ont augmenté depuis trois jours. Six jours plus tard, elle y revient pour les 80 ans de la rafle des 1259 juifs italiens par les Allemands, le 16 octobre 1943. Et rappelle que, « au petit matin, les nazis, avec la complicité des fascistes, ont déclenché une chasse à l’homme impitoyable dans la capitale». Dans ses mots, l’histoire se télescope. Giorgia Meloni est la seule chef de gouvernement présente à la conférence pour la paix au Caire le 21 octobre. Elle y défend que «quand des miliciens filment la décapitation de bébés, leur objectif n’est pus de protéger les Palestiniens, mais de forcer Israël à réagir pour provoquer un conflit plus large». Si elle est venue, c’est pour «maintenir le dialogue avec les pays arabes pour empêcher de tomber dans le piège d’un choc des civilisatians». Et sur le chemin du retour, elle s’arrête à Tel-Aviv pour soutenir Benyamin Netanyahou, trois jours avant Emmanuel Macron. Devant le Sénat italien, le 25 octobre, elle met en garde contre tout amalgame entre le Hamas et le peuple palestinien. Et le 28, elle refuse de soutenir la résolution de l’ONU appelant un cessez-le-feu A Gaza, parce qu’il ne mentionne pas le Hamas. «Jamais, depuis Berlusconi, l’Italie n’avait aussi bien défendu Israel», dit Walker Meghnagi. Les juifs italiens reprochent à la gauche, qui brandit l’étendard de l’antifascisme, d’avoir laissé tomber la question d’Israël. «Au Parti démocrate, il a bien quelques amis d’Israël, mais le parti n’assume pas un soutien sans réserve, regrette Noemi Di Segni à Rome. Sauvent, je m’interroge : et si la gauche avait été au pouvoir, l’Italie mirait-elle aussi bien défendu Israel?» De fait, raconte Claudio Cerasa, directeur du journal Il Foglio, «lorsque nous avons organisé la première manifestation de soutien à Israël au Colisée, les élus de Fratelli d’Italia étaient les plus nombreux, et surtout beaucoup plus que les élus démocrates». Pour autant, Giorgia Meloni n’est pas prisonnière de son soutien à Israël. Elle répète que la solution ne peut venir que de la création de deux Etats. «C’est inévitable», soutient Walker Meghnagi, qui goûte son franc-parler. Petit à petit, devant la multitude d’images émanant de Gaza montrant des civils, souvent des familles et des enfants, blessés et tués, elle rééquilibre son discours et condamne les bombardements, tout en envoyant un bateau höpital au large de Gaza, et deux frégates pour évacuer les civils. Objectif : crédibiliser son rôle de médiatrice alors qu’elle mène un intense dialogue avec les pays arabes. «Dans le rééquilibrage de sa position, estime Maurizio Molinari, directeur de la rédaction de la Repubblica, il apparait que l’Italie, comme la France, pourrait faire partie d’une mission internationale de la protection de la bande de Gaza à la fin de la guerre-» «Le regard de la communauté sur Giorgia Meloni et Fratelli d’Italia a totalement changé, c’est impressionnant, reconnaît Riccardo Pacifici. Dans les groupes sociaux, on la considère avec sympathie : 90 % des personnes avec qui je discute lui sont profondément reconnaissants. Et aujourd’hui beaucoup seraient prêts à voter Fratelli d’Italia. » Riccardo Pacifici, petit-fils d’un rabbin exterminé à Birkenau avec son épouse, est fortement engagé avec les démocrates. Serait-il prêt à voter pour le parti à la flamme? «C’est une option, dit-il. Aujourd’hui, ce n’est plus ini sujet tabou. »